Le Noyé
Oh! le chant des battements de cœurs, Là-bas, dans l’abîme, où se noie son chœur, Et l’onde, à la fin, va torrer, sa lumière D’un palpitant vert des algues éphémères.
C’est l’onde que scelle un voyage en apnée, Templée d’un reflet d’horizon embrasé ; Les lucioles se posent sur les rives noces, Et sur le flot murmure un amour, des choses.
Les Sylphides, Ou les Échos
Dans les branches d’un chêne, à l’ombre d’un ruisseau, Je rêve de l’immortelle virginité, Oh! lent épaississement du temps si léger, Et l’écho frémissant de l’air qui va trop tôt.
Sur la clairière, voici les sylphides, Évoluant en douceur, les feux étouffés ; À la lueur d’azur, s’élance une poésie, Silencieuse et charmante, là où la nature explose.
À la Mer
Terre sans fin, illimitée en traces, Oh ! toi qui montes et descends, sans cesse ! Le rythme de l’onde aux reflets argentés, Chantant l’infini, dans les vagues-là près.
Et sur ta coque argentée, il oscille, Le vent diaphane, léger comme une aulne ; Libérant en hule l’odeur de l’ébène. Soulibré de mer, légère et sans chaîne.
Le Jardin
Douceur céleste de la splendeur nocturne, Quand la rosée venue se mêle aux fleurs, Ah ! le jardin des cœurs, ainsi qu’une lune, Enseigne la magie de tes rêves vainqueurs.
Eveillez-vous, vers et parfums enchantés, Les insectes chantants, ainsi l’aube éclot ; Tout les corps se bousculent dans une mue, Sous vos ombres bienveillantes, ils s’interrogent.
Les Grains de Sable
Fins grains de sable flottant sous le ciel, Accueillez les pas nourris de l’histoire, Je fais des prières aux souvenirs des siècles, En quête de ce silence, ô beauté illusoire.
Vous murmurez au vent, un chant d’autrefois, Respirez la lumière d’un doux souvenir, Les fleurs des dunes, leurs couleurs en émoi, Recouvrent notre corps de leur parfum d’azur.
Sous Les Ombres
Ombres doux d’un soir, pleuvent dans les bosquets, Les rêves, lentement, arabesques effilées, Se mêlent aux mélodies des insectes voilés, Parfums du crépuscule, doux et colorés.
Voici que s’avance la nuit, douce amante, Les murmures s’allument dans la brise actuelle ; Les étoiles, comme des larmes, scintillent et chantent, Le nature en symvirons éclot à la saison rebelle.
- Jean Moréas